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L'économie organique en détails

      Nous voilà partis pour parler de l'économie organique dans le détail, ce qui n'est pas une si mince affaire. Pour celles et ceux qui arriveraient ici directement, je vous invite à lire en préambule Découvrir l'économie organique, qui fera office de pédiluve avant d'entrer dans le grand bain.

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Vocabulaire

Avant d'attaquer, précisons quelques points de vocabulaire. Comme décrit dans l'article L'économie des mots, nous pensons et réfléchissons avec les mots qui sont à notre disposition. Alors soyons tout de suite précis sur certains.

Citoyen : C'est le terme que nous utiliserons pour parler d'une personne qui utilise l'économie organique. Ce n'est pas la même chose qu'un citoyen classique d'une société existante. En effet, celui-ci est libre économiquement et, donc, totalement. Vous en saurez bientôt plus là-dessus aussi.

Écosystème : C'est le terme qui, en économie organique, regroupe les entreprises, les associations et même les services publics.

La base

    La fonction première de l'économie organique est de se défaire de la monnaie comme réserve de valeur (pour en savoir plus sur la réserve de valeur et ses maux, voir l'article Pourquoi l'économie organique ?). Pour cela, elle remplace toute ancienne monnaie (l'euro, le dollar et les autres) par, non pas une, mais deux monnaies. Ces deux monnaies ont des usages différents et sont toutes deux aussi importantes. On ne peut pas faire une économie organique avec une seule des deux, elles sont capitales et complémentaires.

Nous passons d'une monnaie réserve de valeur
à deux monnaies distinctes et indissociables.

 

     La première est la monnaie citoyenne. C'est elle qui sert aux achats de la vie de tous les jours : acheter du pain, du vin, une voiture, un massage, etc. Dans son usage, elle rappelle les monnaies standards. Ce qui est normal, on ne va pas non plus "trop" tout changer.

    La seconde est la monnaie d'investissement. Celle-ci, comme son nom l'indique, sert à investir. C'est une monnaie que chaque citoyen investit dans les écosystèmes qui produisent des biens et services qui conviennent, c'est-à-dire qui répondent à des besoins réels.

L'économie organique se base sur deux monnaies (citoyenne & d'investissement).

    En pratique, cette duplicité de monnaie se traduit par un cycle économique en deux temps. Premièrement, le citoyen qui veut du pain (je schématise, hein ! En fait, c'est "le besoin") investit sa monnaie d'investissement dans un écosystème de fabrication de pain (communément appelé "boulangerie", oui c'est un peu technique). Cette monnaie reçue va permettre à l'écosystème d'acheter ses matières premières, son énergie, de louer son local, etc. Ensuite, les citoyens devront payer, bien sûr, leur pain à la boulangerie. Mais cette fois avec leur monnaie citoyenne. La monnaie citoyenne alors reçue par l'écosystème, en vendant son pain, ne peut pas servir à acheter de la farine ou quoi que ce soit d'autre. Elle ne peut pas non plus être mise de côté ou considérée comme "profit". En réalité, elle ne peut qu'être utilisée pour payer les salaires.

Les échanges en économie organique

     Ce qui veut dire que les écosystèmes ne font pas de profit. L'investissement des citoyens leur donne une trésorerie pour acheter le matériel nécessaire à la production de produits ou de services. Ensuite l'achat de cette production par des citoyens (ou par d'autres écosystèmes) paye les salaires. Point. Pas de profit !

Les écosystèmes ne font pas de profit.

Création et oisiveté

    Là où il y a un changement considérable, c'est dans l'origine de la monnaie. De nos jours, dans les monnaies standards, ce sont les banques qui créent la monnaie : la banque centrale crée des pièces et des billets ; et les banques commerciales créent de la monnaie via les prêts qu'elles accordent aux particuliers et aux entreprises. Grosso modo, bien sûr. Mais cette méthode de création est injuste par nature. En effet, pas besoin de sortir de la cuisse de Jupiter pour comprendre que donner le droit à certains de créer de l'argent et l'interdire à d'autres va peut-être favoriser les premiers économiquement...

    Si l'on vous donnait par exemple le même droit qu'aux banques : vous pourriez désormais prêter de l'argent que vous n'avez pas. Un ami a besoin d'argent ? Pas de problème, vous le créez, vous lui donnez puis vous lui demandez de vous en rembourser une partie chaque mois jusqu'à avoir tout récupéré. Bien sûr, lorsqu'il vous rembourse, vous détruisez l'argent qu'il vous donne et, ainsi, en fin de compte, le résultat est nul. C'est comme si rien ne s'était passé. Alors, je vous vois venir bande de petits gourmands, à tous les coups vous allez lui demander de rembourser un peu plus, histoire de faire du bénéfice. C'est moche parce que ça ne vous a coûté ni effort, ni risque. Et pourtant, c'est bel et bien ce que font les banques. C'est une belle et immense arnaque que tout le monde tolère pour je ne sais quelle mauvaise raison.

Et bien, il est temps de changer les choses ! De régler les injustices.

En économie organique, ce sont les citoyens qui créent la monnaie. Oui, ça y est, tout le monde se retrouve à égalité. Bien sûr, quelques menus détails viennent organiser naturellement cette création monétaire. Premièrement, chaque citoyen crée une monnaie qui lui est propre, la sienne, seule et unique. En pratique, cela veut dire que chaque billet est nominatif : un billet de 20 de Madame Michue, un billet de 5 de Monsieur Michel, etc... Deuxièmement, et heureusement, ni madame Michue, ni monsieur Michel ne peuvent créer autant de monnaie qu'ils le souhaitent, ces petits gourmands. Nous détaillerons plus bas combien ils peuvent en créer et vous verrez que ce n'est pas une décision de la banque, d'un juge ou de qui que ce soit qui décidera à votre place, mais seulement des mathématiques élémentaires.

    Outre cette définition mathématique, cette création monétaire est inconditionnelle. C'est ici qu'émergent souvent l'incompréhension ou l'incrédulité. Chaque citoyen crée sa monnaie, chaque jour, sans condition : qu'il "travaille" ou non, qu'il soit bon ou mauvais, qu'il soit en bonne santé ou malade, qu'il soit jeune ou vieux. En d'autres termes, ça veut bien dire qu'en économie organique on peut ne rien glander de ses journées et quand même avoir de quoi vivre.

    Avant de hurler à la "future société d'oisifs branquignoles", il faut faire un petit travail de contextualisation. Dans l'économie capitaliste, votre salaire est en lien direct avec l'activité que vous exercez à titre professionnel. Vous avez une activité lucrative, typiquement rentier ? Votre salaire est élevé. Vous exercez une activité inconsidérée, typiquement livreur ? Votre salaire est au raz des pâquerettes. Et si vous vivez un coup du sort, un aléa de la vie, peut être passerez-vous de riche rentier à pauvre petit livreur. Comme j'aime à le dire, le capitalisme est un jeu de dé : si vous avez de la chance ou si vous trichez, vous êtes riche ; mais si vous jouez franc et que vous êtes malchanceux, alors c'est tant pis pour vous.

    Dans l'économie organique, en revanche, le salaire n'est pas lié à l'emploi du moment. À la place, il se base sur votre historique. Plus vous êtes actif dans l'économie, plus votre salaire augmente (bien qu'il augmente lentement). Et ce salaire ne diminue jamais. Cela veut dire que le salaire n'est plus la récompense de l'activité profitable (qui, dans le capitalisme, récompense surtout les fripouilles) mais la reconnaissance de votre investissement passé dans la société.

    Donc on ne peut pas réellement parler d'une société d'oisifs, mais à la place d'une reconnaissance de la valeur économique de chacune et chacun. Et cela a bien plus de sens. Personne n'est alors obligé de se vendre sur le marché du travail. Vous n'avez plus besoin de produire des biens complètement inutiles pour pouvoir disposer d'un salaire. Cela raisonne encore plus quand on sait que seul 5 à 10% du travail de l'ensemble de la société suffirait à répondre à l'ensemble des besoins. Tout le reste n'est là que pour mériter salaire, sans aucune espèce d'utilité.

La création monétaire est inconditionnelle.

D'où vient l'argent

    Maintenant, venons-en à la quantité de monnaie que chaque citoyen crée. Car nous ne sommes pas dans un clip de rap où on balance des billets à foison parce qu'on se sent riche et et au-delà de toute limite.

Ah bah tiens, justement,
je parlais de vous.

Non, en économie organique, la quantité de monnaie que crée un citoyen dépend de son expérience économique. Oui, ça sonne un peu comme un gros mot, ça. Et j'avoue que ça va être le truc le plus compliqué à comprendre. C'est trop bouleversant, je vous jure...

    Quand Bilbon paye 20 balles à Gandalf, en euros, Bilbon n'a plus les sous et Gandalf à 20 euros de plus qu'avant, qu'il pourra dépenser à son tour. Ça, c'est ok pour vous, n'est-ce pas ? La normalité. Bon, maintenant, imaginez que la monnaie soit à usage unique. Quoi ? Oui, je sais, c'est chaud. Je vous refais donc la scène : Bilbon paye 20 balles à Gandalf, mais cette fois c'est de la monnaie citoyenne. Bilbon avait 20 balles avant et, après avoir payé Gandalf, ne les a plus. Cette partie-là ne change pas. Mais Gandalf, lui, n'a pas 20 de plus dans son porte monnaie. "Mais où sont-elles passées alors ?" me demanderez-vous, en toute logique. Et bien, plutôt que d'aller dans son porte monnaie, cette monnaie citoyenne reçue de la part de Bilbon va dans l'expérience économique de Gandalf.

    Donc, toute la monnaie qu'un citoyen reçoit comme paiement (commerce, salaire, etc), il ne peut pas la dépenser à nouveau, à la place elle va directement dans son expérience économique. C'est parce que la monnaie est à usage unique.

La monnaie organique (citoyenne & d'investissement) est à usage unique.

     C'est le bon moment pour se demander "mais alors, à quoi sert cette expérience économique, bon dieu !". Hé, doucement là ! J'y viens. L'expérience économique commence à zéro. C'est-à-dire que quand vous devenez citoyen, vous avez un compte avec zéro de monnaie citoyenne, zéro de monnaie d'investissement et zéro d'expérience économique. Et oui, il faut bien commencer quelque part. Dans ce cas, quand votre expérience économique est à zéro, vous créez une et une seule unité de monnaie citoyenne, ainsi qu'une et une seule unité de monnaie d'investissement par jour. Ensuite, plus tard, quand vous recevrez des paiements (parce que vous avez vendu une botte de carottes au voisin, par exemple, ou parce que vous touchez un salaire, ou les deux), la monnaie reçue ira dans votre expérience économique. Alors, comme votre expérience économique est plus grande, vous créerez un peu plus de monnaie citoyenne et de monnaie d'investissement chaque jour. Tout simplement.

    Pour faire une métaphore avec le système actuel, c'est un peu comme si, à votre naissance, on vous ouvrait un compte épargne : votre expérience économique. Et chaque fois que vous receviez de l'argent, il irait sur ce compte épargne. Mais ce compte est particulier parce qu'il est à sens unique : vous pouvez y ajouter de l'argent, mais jamais en retirer. Ainsi, la quantité de monnaie sur ce compte ne fait qu'augmenter (ou stagner, si vous ne "gagnez" rien) et ne peut jamais baisser. Frustrant, tout ce pognon inaccessible, hein ? Oui mais non, parce que chaque jour vous touchez les "intérêts" générés par ce compte épargne. Cette monnaie, par contre, c'est la vôtre et vous pouvez la dépenser. Et vous êtes sûr, certain, que chaque jour, sans exception, sans limite d'âge, sans preuve de casier judiciaire, vous aurez vos fameux "intérêts".

Son expérience économique définit la quantité de monnaie que crée un citoyen.

     Si vous avez bien suivi, c'est d'ailleurs cette caractéristique, d'être "à usage unique", des monnaies organiques qui fait que les écosystèmes ne font pas de profit. Ils ne peuvent pas garder la monnaie citoyenne que les citoyens leur payent car celle-ci doit bien et toujours aller dans une expérience économique. Or, les écosystèmes n'ont pas d'expérience économique, mais leurs salariés, si. Donc, pouf!, tout ce qui n'est pas de la monnaie d'investissement, c'est direct dans les expériences économiques des citoyens qui œuvrent dans l'écosystème. Autrement dit, les salaires.

Conclusion

    Si vous êtes arrivé jusqu'ici, bravo. Si vous avez tout compris, encore plus bravo. Parce que, bien que les éléments soient relativement simples à appréhender, le tout nécessite un basculement mental qui s'avère encore souvent difficile. Mais à force, ça vous paraîtra sûrement naturel.

    Maintenant que vous avez compris en quoi consiste l'économie organique, vous pouvez éventuellement lire pourquoi l'économie organique pour comprendre un peu les maux qu'elle corrige.

    Enfin, si vous avez des questions, faites-vous plaisir. Je sais que ce n'est pas évident à appréhender, alors il faut y aller franco sur la levée des doutes. Donc, lancez-vous. Je répondrai.

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